Scènes

SCENES

 

Carton Recto  Carton Verso

 

Exposition du 9 au 30 mai 2009, vernissage jeudi 7 mai 19h30

Barbora Pivonkova, Flore Chenaux

 

Là où le texte dit, la photo tait. Là où le spectacle vivant se déploie, la photo se tient, immobile. Là où le film avance et se déroule, la photo retient. Ni dans le vivant, ni dans la parole, ni dans la rassurante durée. La scène du cadre photographique ne ressemble à aucune autre scène.

Image panoramique d’un paysage champêtre. Même un paysage tranquille… Au sortir d’une futaie, quelques arbrisseaux dans lesquels joue le soleil, un amas de terre, une prairie, un verger, les lointains bleutés. Même une prairie avec des vols de corbeaux, des moissons et des feux d’herbes…La bande de bitume gris bleu d’une route, l’arbre penché comme par la vitesse, mais quelle vitesse ? Même une route où passent des voitures… Une clairière dans l’ombre, un angle de maçonnerie, la ligne horizontale d’un tronc abattu. Ou encore un ruisseau sinuant sous les frondaisons.… Peuvent conduire tout simplement à… (Jean Cayrol, dans Nuit et Brouillard, Alain Resnais, 1955). Le paysage n’a rien de désolé, ses couleurs réalistes sont atones ; il est vide mais pas désert (alors, disons « vidé » : il y a bien un rapport bizarre avec la présence). Peuvent conduire tout simplement à… Quels drames, quels faits divers se cachent derrière les photographies de Barbora Pivonkova, le spectateur attendra d’être au plus près des images pour le savoir. Pour faire, encore une fois, l’expérience du réel photographique, qui recouvre autant qu’il montre.

C’est sur une autre scène que se jouent les photographies de Flore Chenaux. Une scène bien connue, celle du petit théâtre domestique, instants fugitifs, éclats d’images formatées pour une mémoire à venir. Des scènes déjà vues. Douze photos en noir et blanc. On les regarde, elles sont carrées. Pas cadrées au millimètre. Des personnes, des vraies, approchées des années ou une seconde ; on ne les connaît pas, on les a connues, on se croisera peut-être. Des moments, fugaces ou étirés, d’ailleurs même pas des moments, juste « ça se passe, ça arrive». Des tâches, des occupations, du repos, la vie quoi. Et encore : des attitudes, un regard échangé, les gestes et le corps, plié. Tout ce qui nous échappe chaque jour. Et l’intensité de la série tient précisément à la dilution du désir de représenter, de résumer, de mettre en scène.

Il y a bien des façons de considérer une scène. Et toutes les scènes ne nous constituent pas en spectateurs. Or celles qui sont présentées ici ont cette caractéristique commune : se montrer dans toute leur apparence, puis requérir notre participation pour une lecture à double détente. C’est peut-être cela que nous disent ces photographies : que nous ne sommes pas spectateurs du réel, mais que nous en sommes les acteurs.

 

                                                                                             Bruno Dubreuil / Immixgalerie

Barbora Pivonkova / Flore Chenaux


Vernissage